La naissance du jean à San Francisco
En
1853, le jeune Oscar(?) Levi Strauss, originaire de Bavière, modeste colporteur
juif exerçant à New York, arrive à San Francisco en pleine fièvre de l’or. Il
transporte dans ses chariots des toiles de tente et des bâches qu’il espère
vendre aux pionniers [on appelle les premiers arrivés – en 1849, les forty niners]. Mais ceux-ci lui
expliquent que ce n’est pas tant de ces articles dont ils ont besoin que de
bons pantalons résistants et fonctionnels.
Levi
Strauss compte parmi ses clients un tailleur, Jacob Davis, qui confectionne
pour les bûcherons des pantalons renforcés par des rivets métalliques aux points sensibles. Les deux hommes
déposent ensemble un brevet, Levi Strauss taille dans ses toiles des pantalons
de dessus et salopettes [overalls]
rivetés, le succès est immédiat. Les mineurs chercheurs d’or sont très contents
de leurs pantalons ultra-costauds aux poches suffisamment solides pour contenir
les pépites d’or qu’ils trouvent. Levi Strauss fonde avec son beau-frère une
société de confection et de textile industriel qui va se développer au cours
des années pour devenir la multinationale Levi
Strauss & Co, qui cultive aujourd’hui cet héritage.
A ses débuts, le jean n’est pas encore bleu, mais dans des
tons qui vont de l’écru au brun, ces étoffes rèches et épaisses sont très
difficiles à travailler. Levi Strauss les remplace peu à peu par le denim, un tissu à l’armure serge , teint à l'indigo, importé d’Europe. En 1860, la société
Levi Strauss ne travaille plus que le denim. En plus des rivets apparaissent en
1873 sur les poches arrière des surpiqûres en lin orange, pour les assortir aux
rivets de cuivre.
En 1912, c’est avec un article pour
enfant, la Koveralls, une
combinaison en denim, que la compagnie Levi Strauss étend pour la première fois
son marché de la côte Ouest à l’ensemble des Etats-Unis. Elle s’appuie sur une
large publicité, affiches et marques peintes, la Koveralls gagne un prix en 1915 à l’Exposition
Internationale Panama-Pacific. En 1918,
apparaissent les Freedom-Alls
qui désignent à la fois des vêtements de travail brevetés et des vêtements de
loisir pour les femmes.
Peu à
peu, à partir des années 1920, le jean glisse du vêtement de travail au
vêtement de loisir et de folklore ; en 1922 les bretelles disparaissent pour
laisser place aux passants. Pendant la grande crise de 1929, peu cher, il est
adopté par les paysans et les travailleurs. Entre 1933 et 1938, dans le cadre
du New Deal, des dizaines de milliers de salopettes en denim sont distribuées
aux déshérités.
C’est
en 1930 que Levi Strauss & Co commence à utiliser l’image du cowboy, même si les jeans sont alors
toujours considérés comme des vêtements de travail. Vers 1935, par le biais du
cinéma qui s’en empare, les citadins découvrent la campagne et le jean, parents
et enfants jouent aux cow-boys. On ôte au jean ses rivets pour qu’il n’abîme
pas les chaises d’école et d’université. Il se répand chez les étudiants et les
artistes, il s'introduit dans la garde-robe féminine. La luxueuse revue Vogue publie en couverture la première
réclame Levi Strauss en 1935, signe que le jean a passé la barrière sociale des
ouvriers vers la riche société de l’Est – c’est suffisamment rare dans ce sens
pour le souligner.
Le
jean fait partie de la tenue de base des GI’s et débarque avec eux en Europe en
1945. À la démobilisation, les magasins de surplus américains écoulent ces
marchandises dans toute l’Europe, soutenus par le succès des films américains.
Le jean symbolise l’Amérique, celle des pionniers héros de la conquête de
l’Ouest, celle des stars comme John Wayne, Gary Cooper ou Henry Fonda qui le
portent, il se fait universel.
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